La Matra MS 670-01

5/5 - (1 vote)

 

Durant la vente Artcurial « Parisienne 2021 » du 5 février prochain, la Matra MS 670-01, première Matra victorieuse au 24 Heures du Mans en 1972 va être cédée par son propriétaire actuel, le Groupe Lagardère.
Je ne reviendrai pas sur les obscures raisons qui ont conduit à cette situation, libre à vous de rechercher des informations à ce sujet et de vous faire, par vous-même, votre propre avis.
Mon propos se limitera donc à relater la carrière de ce châssis et à tenter de mettre en avant, s’il en était besoin, l’importance de cette auto dans l’histoire du sport automobile français.

 

Le Mans et rien d’autre.

 

En cette année 1972, avec la fin des Sport 5 litres, Matra a enfin une chance réelle de remplir le second objectif donné par Jean-Luc Lagardère quelques années plus tôt, remporter les 24 Heures du Mans.
La concurrence est rude avec des Ferrari 312 PB très rapides, les Alfa Romeo, Mirage, Lola et autres Porsche.
Autre fait notable favorisant la montée en puissance des protos 3 litres, Matra réduit la voilure en F1 et n’alignera cette année là qu’une seule voiture pour Chris Amon, la MS 120 C qui évoluera en MS 120 D à partir du GP de France à Charade.
Tous les moyens économisés vont être redirigés vers les prototypes et l’équipe va se concentrer sur un seul objectif, le Mans.
Initialement, deux courses avaient été prévues pour préparer l’épreuve mancelle, mais au final, Matra va innover et faire impasse sur toutes les manches du Championnat du Monde, laissé à Ferrari, imaginé intouchable.

 

De son côté, l’équipe française va se préparer sur le circuit du Castellet lors de trois simulations de 24 Heures.
Une nouvelle usine est en construction sur le circuit varois pour remplacer les locaux des Engins Matra à Vélizy, mais le déménagement ne sera effectué qu’après les 24 Heures, pour ne pas gêner la préparation de la course.
La première de ces simulations a lieu le 8 mars 1972, avec une voiture de transition.
En effet, la MS 660-01 a été modifiée pour recevoir le nouveau treillis avant de la MS 670 permettant le montage des roues de 13″.
La voiture est équipée de la boîte noire développée par Jean-Louis Caussin et les essais, hormis sur l’endurance du moteur, portent en particulier sur le comportement des nouvelles roues avant.
Quatre pilotes allaient se relayer au volant, Jean-Pierre Beltoise, Chris Amon, François Cevert et Howden Ganley. Deux types de capots arrière, court et long vont être testés.
L’essai prend fin au bout de 20h30 sur rupture du joint de culasse et le démontage révélera de gros problèmes de surchauffe des synchros de la boîte ZF.

 

Les 18 et 19 mars, c’est encore la MS 660-01, désormais dénommée 660/670, qui va participer aux Essais Préliminaires des 24 Heures du Mans.
Cevert, utilisant un MS12 « dégonflé » à 430cv et monté en Goodyear G20 démodés réalise néanmoins un encourageant 3’41″6, deuxième chrono du weekend, à seulement 1″2 de la plus rapide des Ferrari, celle de Ickx en 3’40″4.
Une fois encore, trois capots sont testés, deux longs, de type pédalo avec des implantations d’ailerons différentes, et un court, avec des sabots adaptés derrière les roues, pour répondre au nouveau règlement.
Ces essais permirent de valider l’utilisation de dérives verticales pour pallier au survirage dans les courbes rapides.

 

Matra MS 670-01 24 Heures du Mans 1972 Graham Hill

En fin d’après-midi, Graham Hill, qui cherche déjà des yeux le panneautage de Mulsanne, a récupéré le commandement. Mais il va bientôt être handicapé par des problèmes de tringlerie de boîte.

 

La première MS 670.

 

La première MS 670, la 01, ayant été assemblée dans le courant du mois de mars, un second test d’endurance fut organisé les 11 et 12 avril.
Une fois encore, Caussin équipa la voiture de sa boîte noire.
Cinq pilotes sont cette fois présent, Chris Amon, Jean-Pierre Beltoise, Howden Ganley, Henri Pescarolo et Graham Hill.
Le test prend fin au bout de 574 tours soit 22h30, le joint de culasse du MS 12 ayant de nouveau lâché.
Deux alertes de boîte de vitesse ont eu lieu, une au 200ème tours suite à un roulement mal monté, puis au 500ème tour sur rupture de la fourchette 2ème/3ème.
Selon Georges Martin, il était très probable que les problèmes de joint de culasse soient provoqués par les efforts dus aux vibreurs du Paul Ricard, mais il est tout de même décidé de le renforcer.
Durant ce test, il aura été impossible aux pilotes de choisir vraiment entre les capots longs et courts.
C’est donc à cette occasion qu’il sera décidé que pour les 24 Heures, une voiture sera équipée d’un court, l’autre d’un long, et la troisième des deux, le choix revenant aux pilotes avant la course. Ce sont Beltoise et Amon qui bénéficieront de cette dernière possibilité.
Autre problème, une partie de ce test eut lieu sous la pluie.
Hors, en 1972, les pneus pluie fournis par Goodyear avaient un diamètre légèrement plus important que les slicks. Ce changement d’assiette influa beaucoup sur la MS 670 et la voiture devint tout à coup très délicate à piloter. Il fût donc décidé de commander au manufacturier des pneus spéciaux, d’un diamètre identique aux pneus sec pour résoudre le problème.

 

Le 26 avril, la 01 participe à des tests sur l’aérodrome de Marigny pour valider certains éléments de carrosserie.

 

Le troisième test d’endurance, toujours sur la MS670-01, eu lieu les 3 au 5 mai avec, cette fois, Beltoise, Pescarolo, Ganley et Jean-Pierre Jabouille.
Les pilotes avaient reçu pour consigne de soigner leurs passages de vitesse afin de préserver la boîte.
Un premier ennui eut lieu au bout de 164 tours avec la rupture du roulement de porte-moyeu arrière droit, mais ce dernier ayant déjà assuré le précédent test, l’usure fut considérée comme normale.
Malgré les précautions des pilotes, une fois encore, la fourchette de 2éme/3éme cassa au 485ème tour.
Une fois réparé la voiture repartie et effectua, au final, 814 tours, soit 5021 km en 28h30 et cette fois-ci, le joint de culasse avait tenu.

 

Martin, avec la collaboration des techniciens de ZF et la contribution de l’usine Simca, se chargea d’étudier les problèmes de fourchette de boîte.
Suite à ses travaux, une nouvelle pièce, renforcée, fût dessinée chez Matra et usinée dans le même acier spécial qui servait à faire les bielles du V12.
Un nouveau test eut lieu à Monthléry le 31 mai avec Graham Hill et Beltoise pour valider la pièce. Pour l’occasion, la MSD 670-01 est motorisée par un MS12/71
Parallèlement, des tests d’endurance furent lancés au banc chez Simca et donnèrent toute satisfaction.

 

Début mai, le fournisseur d’embrayage de Matra envoya un courrier conseillant d’utiliser un nouveau modèle tri-disque, renforcé. Martin refusa et décida de conserver le système classique, qui avait toujours donné satisfaction jusque-là.
Pour
ne prendre aucun risque, les moteurs, comme les capots, vont être également panachés.
Ainsi quatre voitures sont préparées pour le Mans.
La MS670-01, celle des tests d’endurance, sera confiée à Graham Hill et Henri Pescarolo et motorisée par un MS12, la 02, confiée à François Cevert et Howden Ganley et motorisée par un des nouveaux MS72 donné pour 30 cv plus puissant que le MS12, la 03, confiée à Jean-Pierre Beltoise en Chris Amon, motorisée également par un MS72, et enfin la MS660-03, confiée à Jean-Pierre Jabouille et David Hobbs et motorisée par un MS12 plus « classique » que celui de la 01.
Malgré une campagne de presse défavorable suite aux déclarations malheureuses de Beltoise dans Paris-Match, la préparation des voitures est optimum et l’équipe est parée à se jeter dans le grand bain.

 

Matra MS 670-01 24 Heures du Mans 1972 Graham Hill

En fin de matinée, Graham Hill tente un coup de poker et fait monter des pneus mixtes sur MS 675-01. La course bascule alors en faveur de la n°15 et Hill remonte sur Ganley avant de la lui ravir le commandement.

 

Les 24 Heures du Mans 1972.

 

Une semaine avant le début du pesage, la nouvelle tombe. Ferrari, invaincu depuis le début de la saison, déclare forfait. Officiellement, les grèves en cours en Italie sont évoquées, mais plus officieusement il semble que la Scuderia rencontre surtout des soucis d’endurance avec les boxer 3 litres et surtout d’insolubles problèmes de fiabilité avec le nouveau système d’embrayage tri-disque Borg and Beck, celui refusé par George Martin.
Les Matra ouvrent le pesage, le lundi 5 juin à 14h.
Les voitures, superbes, sont pesées aux alentours de 720 kg, les Alfa sont un peu plus légères, les Lola plus lourdes.
Pescarolo et Hill ne sont pas au mieux de leur forme, le français souffre d’une angine, l’anglais a des douleurs à une épaule suite à un accident en F2.


Le mercredi soir, la première séance d’essais se déroule sous la pluie.
Pescarolo est le plus rapide des hommes de Matra, troisième derrière l’Alfa de Rolf Stommelen et la Lola de Gérard Larousse. Cevert s’est fait piéger et a tapé, mais les dégâts sont superficiels.
Le lendemain, sur le sec, les « Matra boys » vont faire un festival et placer les trois MS 670 aux trois premières places.
Cevert signe la pole à 220,990 km/h de moyenne en 3’42″2, Pescarolo est second en 3’44″9 malgré des problèmes de freins, Beltoise troisième en 3’46″6.
Le parisien et Amon ont été gênés par une vibration du MS72 et vont effectuer des tests moteur sur l’aérodrome le vendredi. Finalement, le moteur va être conservé pour la course.
La MS 670-01, de son côté, est motorisée par un MS12, le n°52, mesuré au banc pour 416 cv à 9800 Tr/min, il bénéficie des bielles en titane et de nombreuses évolutions, comme le système de lubrification à trois pompes de vidange comme sur les MS72. Sa boîte de vitesses ZF à cinq rapports est de type 5DS25 et porte le numéro 4476.

 

Le départ a lieu sous les yeux du Président Georges Pompidou, très lié à Matra.
Lorsque le pace-car rentre, Cevert s’arrange pour laisser passer Pescarolo. Il est superstitieux et sait très bien qu’il est rare que la voiture en tête au premier tour remporte les 24 Heures.
Mais, alors qu’il vient de prendre le commandement à la chicane Ford à l’entrée du deuxième tour, Beltoise ralentit soudain devant les stands et se laisse rouler, moteur en feu, jusqu’au poste de commissaires au bas de la descente de la Chapelle.
Tout de suite, les autres Matra ralentissent, laissant les deux Lola de Bonnier et De Fierlandt boucler la première heure en tête, Pescarolo est troisième.
Il hausse le rythme durant la seconde heure, et , dépassant Stommelen et Cevert, prend le commandement.
Mais, alors qu’il va passer le relais à Hill lors du second ravitaillement, il faut refixer un sabot d’aile arrière qui se détache et l’anglais repart 4ème.
Durant l’heure suivante, Stommelen commence à connaitre des problèmes avec l’embrayage de l’Alfa et Jabouille tombe en panne d’essence en vue des stands, Hill est second et remonte sur Ganley.
L’anglais dépasse le néo-zélandais à la quatrième heure mais la commande de boîte commence à se gripper et il ne peut se maintenir en tête.
Lors du ravitaillement suivant, les mécanos graissent abondamment le mécanisme et tout rentre dans l’ordre, il semble qu’un guide en téflon soit défectueux et que la tringlerie frotte contre la coque.
Hill et Pescarolo attaquent fort pour remonter mais les problèmes de freins connus aux essais ne semblent pas complètement réglés et ils les usent plus que leurs coéquipiers.
Les plaquettes avant, rongées jusqu’au fer, doivent être changées à la 7ème heure, les arrières à la 8ème.
La n°15 repasse en tête à la 10ème heure lorsque Cevert et Ganley doivent, à leur tour, changer de plaquettes.
Peu après 2h00 du Matin, Jean-Luc Lagardère remarque que la Matra aux parements verts fume, ce que confirment les panneauteurs de Mulsanne.
Gérard Ducarouge fait rentrer la voiture de tête.

 

Matra MS 670-01 Le Mans 1972 Henri Pescarolo

Après les déboires de Cevert et Ganley sur la n°14, Henri Pescarolo va assurer une fin de course relativement sereine, malgré le retour de la pluie pour les derniers tours.

 

Le bouchon de la bâche à huile avait été mal refermé lors du dernier ravitaillement et le lubrifiant coule par intermittence sur l’échappement.
Pescarolo repart rassuré mais second.
Il repasse en tête et détient une avance de 50″ sur Cevert à mi-course. Jabouille, troisième, est à 7 tours.
Mais lorsqu’il ravitaille durant l’heure suivante, il faut de nouveau changer les plaquettes. Elles sont tellement usées qu’elles se sont soudées aux pistons et les mécaniciens de Matra mettent six minutes à les changer. Le pilote au casque vert repart avec un tour et demi de retard.
Le jour se lève et malgré le panneautage qui lui intime l’ordre de ralentir, Pescarolo est à l’attaque.
A la 19ème heure, les deux Matra sont de nouveau dans le même tour.
Vers 10h40, Hill tente un coup de poker lorsque la pluie commence à tomber et fait monter des pneus mixtes.
Ganley, en slicks, ne peut résister à la remonté de l’anglais qui revient à deux minutes, d’autant que la pluie redouble.
Le néo-zélandais rentre pour changer ses gommes et Hill passe en tête. L’allumage de n°14 a pris l’eau et Ganley s’arrête encore au tour suivant pour le faire sécher, la n°14 est à un tour.
Vers midi, au cœur de l’averse, Ganley se fait percuter de l’arrière dans les Hunaudières par la Corvette de Marie-Claude Beaumont, il réussit à rejoindre les stands, mais lorsque Cevert repart, la course est perdue.
Ganley a mis 23 minutes à rentrer, les mécanos de Matra huit minutes à réparer et 20 nouvelles minutes vont être perdues lors de deux arrêts pour réparer l’allumage du MS72.
Pescarolo va assurer les derniers relais de la n°15 et bien qu’il passe la ligne côte à côte avec Cevert, les deux Matra ont un écart de neuf tours en faveur de la MS 670-01.
Comme lors de chaque victoire Matra au Mans, les motoristes vont se rendre compte au démontage que le joint de culasse du MS12 de la n°15 avait lâché.

 

La saison 1973.

 

La MS 670-01 va continuer sa carrière sportive en 1973 et participer à la conquête du premier titre mondial de la marque française.
Début janvier, elle est équipée de la nouvelle carrosserie développée pour la saison 1973 avec, notamment, le capot avant concave à porte-à-faux raccourci.
Les 11 et 12 février, elle participe à une séance d’essais au Castellet lors de laquelle la nouvelle définition aérodynamique est testée et validée.

 

Les 31 mars et 1er avril, la MS 670-01 est alignée aux essais  préliminaires des 24 Heures du Mans. Ferrari a fait l’impasse.
Jean-Pierre Beltoise va procéder à de nombreux tests aérodynamiques le samedi.
Ainsi, plusieurs lames avant sont essayées ainsi que deux modèles de capots arrière, un de type sprint 1973 et l’autre de type pédalo 1972 sur lequel a été ajouté un becquet sous l’aileron.
Différentes prises d’air ainsi que des roues avant BBS nid d’abeilles sont également testées.
Le second capot arrière va être modifié au cours de la journée par l’adjonction de rehausses en mousse enserrant les dérives verticales et lui donnant alors une forme très proche de la version définitive du Mans 1973.
Dans cette configuration, Beltoise bat le record du circuit en 3’38″4 avant de tomber en panne d’essence.
Le lendemain, Gérard Larrousse, qui était retenu sur la Lola T292 Archambeaud la veille, se familiarise avec la MS 670. Il va rouler en version capot court et capot long avant que Beltoise ne retourne en piste en fin de matinée.
Le parisien va améliorer et descendre en 3’36″3 avant que la transmission ne lâche peu avant la chicane Ford.
En un an, la MS 670 a gagné presque 10 km/h en vitesse de pointe et 5″3 au tours. Le temps de Jacky Ickx avec la 312 PB en avril 1972, 3’40″4, a été battu de plus de quatre secondes.

 

Matra 670-01 Essais Préliminaires 24 Heures du Mans 1973 Jena-Pierre Beltoise

Jean-Pierre Beltoise lors des essais préliminaires des 24 Heures du Mans 1973 du 31 mars et 1er avril 1973. A cette occasion, de nombreux tests aérodynamiques vont être effectués.

 

Début avril, la Matra MS 670-01 est entièrement révisée et gréée avec un capot arrière court type sprint 1973.
La première des 670 fait son retour en course lors des 1000 Km de Monza le 25 avril.
Cevert a fait le meilleur temps aux essais sur la 03 et Pescarolo a qualifié la 01 au troisième rang.
Mais, en course, les Ferrari vont briller sur leurs terres et les Matra vont souffrir.
Même si la Scuderia perd une voiture, Jacky Ickx et Brian Redman suivis à trois tours par Carlos Reutemann et Tim Schenken signent le doublé.
Pescarolo et Larrousse, retardés par le bris de la fusée avant gauche, terminent sur la troisième marche du podium à dix tours. Attardés eux aussi par des problèmes de fusée avant gauche, de sélection de boîte et d’embrayage, Cevert et Beltoise finissent onzième à quarante tours.

 

Le 6 mai 1973, pour les 1000 Km de Spa,  Cevert et Beltoise participent au Grand Prix de Pau F2, ils sont remplacés par Chris Amon et Graham Hill.
Pescarolo et Larrousse pilotent la 03, Amon et Hill la 01.
Aux essais, Ickx a signé la pole dans son jardin ardennais à 263,414 km/h de moyenne en 3’12″700. Pescarolo, à plus d’une seconde est second et Amon septième.
En fin de séance, Larrousse se fait une frayeur lorsqu’une bielle du V12 Matra traverse le carter et provoque un début d’incendie sur la 03.
Dès le départ, Pescarolo est déchaîné et dépasse Ickx dans le haut du circuit.
Le français se « balade » littéralement en tête jusqu’au premier ravitaillement.
Ickx reste alors en piste et attaque comme un diable avec une voiture plus légère. Lorsque Redman ressort des stands au quatorzième tour, la Ferrari a prit le commandement.
Pescarolo, qui a doublé son relais réussi  à remonter sur le pilote belge, mais au 17ème tour, un de ses pneus perd sa bande de roulement et il met beaucoup de temps à rentrer.
Au 19ème tour, un des pneus éclate sur la 01 pilotée alors par Amon et le néo-zelandais perd alors la seconde place au profit de Bell sur la Mirage.
Quatre tours plus tard, Pescarolo est victime d’une nouvelle défaillance d’un pneu et beaucoup de temps est de nouveau perdu. Dans le tour suivant, la bande de roulement d’un des pneus d’Amon se détache brusquement..
Larrousse a relayé Pescarolo et Hill a remplacé Amon au volant, les deux Matra pointent cinquième et sixième, la 03 devant la 01.
Mais une bougie va casser sur la 03 et les positions vont s’inverser.
Juste après la mi-course, la Mirage d’Hailwood prend le commandement, une durit d’huile a lâché sur la Ferrari de tête et la boîte s’est bloquée.
Pace et Merzario sont seconds devant la Mirage de Ganley et Schuppan, les deux Matra quatrième et cinquième, Hill devant Larrousse.
Mais au 47ème tour, la même durit se détache sur la Ferrari de Merzario, l’italien réussi tout de même à rejoindre les stands.
Chez Matra, Pescarolo passe sur la 01 et Amon sur la 03.
L’homme au casque vert attaque comme un fou pour remonter les Mirage, mais le V12 ne va pas résister au traitement et rend l’âme lorsqu’une soupape se brise.
Avant que le moteur ne casse, le grand Henri va signer un record du tour en 3’13’’400, soit 262,461 Km/h.
Ce temps sera le plus rapide des records du tour jamais enregistré sur circuit routier, et n’a jamais été battu depuis.
Sur la 03, Amon n’est pas en reste et revient sur la Ferrari malade qui a repris la piste, il la dépasse peu avant la fin et permet à la Matra de terminer sur le podium derrière un étonnant doublé Mirage.

 

Le 27 mai se courent les 1000 du Nürburgring, les Matra MS 670-01 et 03 ont retrouvé leurs équipages habituels.
Les français vont manquer de réussite sur le difficile circuit de l’Eifel.
Cevert signe la pole en 7’12″800, presque trois secondes pleines devant la Ferrari de Ickx, mais casse un moteur. Pescarolo se classe quatrième sur la grille derrière l’Alfa Romeo T33/TT/12 de Rolf Stommelen et le MS72 de la 01 casse également.
Cevert et Beltoise dominent le début de course, Cevert signant le meilleur temps. Mais une bielle du V12 Matra va décider d’écourter la démonstration de la 03.
Dans le tour suivant, c’est Pescarolo qui range la 01 fumante sur la bas côté pour la même raison mécanique.
Les Ferrari signent le doublé, Ickx/Redman devant Pace/Merzario. L’inattendue Chevron B23 de John Burton et John Bridges complète le podium.

 

Deux semaines après la seconde victoire Matra au Mans, le 24 juin, se disputent les 1000 Km de Zeltweg.
Manifestement les italiens ont pris un coup au moral, et, dès les essais, les Matra vont se montrer impériales sur le rapide circuit autrichien.
Cevert est une nouvelle fois le plus véloce aux essais en 1’37″640 devant Pescarolo à 1″3. Ickx est troisième à deux secondes pleines, Merzario n’a pu mieux faire que cinquième à 2″3.
Pescarolo et Larrousse vont mettre un point final à la carrière de la MS 670-01 de la plus belle manière qui soit, par une victoire.
Beltoise et Cevert, sur la 03, terminent seconds à un peu plus de 46 secondes après avoir connu des soucis d’alimentation les obligeant à ravitailler plus souvent. Cevert, auteur du meilleur tour en course, va perdre du temps bêtement en oubliant de mettre ses bouchons d’oreilles. Il va devoir s’arrêter une fois de plus pour réparer son oubli.
Ickx et Redman terminent troisièmes, à un tour.

 

La transformation.

 

Suite à une demande du service publicité de Matra, la MS 670-01 va, fin juillet 1973, être transformée en clone de la voiture victorieuse des 24 Heures du Mans cette année là, la MS 670B-02, dont la coque continue sa carrière en tant que voiture de développement et va participer, de nouveau, aux 24 Heures du Mans 1974.
Pour ce faire, bien que la partie avant de la 01 reste inchangée, elle reçoit le capot arrière long prévu comme pièce de rechange de la MS 670B-02. Ce capot est celui monté en course à la septième heure, difficilement, suite à une panne des feux arrière.
Côté mécanique, elle reçoit un moteur « creux » accouplé à une boîte Porsche vide ainsi que des éléments de suspension arrière adaptés à la boîte Porsche.
Elle est redécorée aux couleurs de la voiture victorieuse au Mans un mois plus tôt.
Dans cette configuration, la MS 670-01 va assurer de nombreux salons jusqu’à la fin de l’année 1973.

Début 1974, Matra signe un contrat de sponsoring avec un cigarettier français. L’évocation publicitaire sera alors affublée de stickers Gitanes, ajoutés par-dessus la déco du Mans 1973.
C’est sous cette forme qu’elle sera exposée dans le village lors des 24 Heures du Mans 1974.

 

Matra MS 670-01, 24 Heures du Mans 1974.

La MS 670-01, victorieuse en 1972, retrouve le Mans en 1974. Elle est alors maquillée en MS 670B-02, victorieuse en 1973, qui continue sa carrière en piste.

 

La MS 670-01 rejoint le Musée Matra de Romorantin dès sa création en 1976 sans aucune modification.
Le premier musée n’étant pas chauffé, elle est rapidement atteinte par la corrosion et des travaux de sauvetage sont entrepris en 1986 afin de traiter et protéger les pièces affectées.
Le Musée Matra déménagera dans de nouveaux locaux mieux isolés et chauffés en 2000.

Une restauration complète de la MS 670-01 est lancée en 2002 par l’Atelier du Patrimoine Matra, mais, en 2003, les travaux sont arrêtés lorsque l’usine Matra de Romorantin cesse son activité.
La 01 retourne au musée et continue à y être exposée, en partie démontée, durant cinq ans.
En 2008, la société EPAF, basée à Romorantin, reprend sa restauration.
Durant cette campagne, le moteur et la boîte « creux » sont remplacés par un V12 MS76 et une boîte Porsche provenant des réserves du musée. Les travaux s’achèvent en 2010.
Cette remise en état de marche permet à la MS 670-01 de fêter le quarantième anniversaire de sa victoire en participant à la parade d’avant course des 24 Heures du Mans 2012 ainsi qu’à une démonstration regroupant également la MS 660-01, la MS 670B-02 et la MS 670B-06 lors du Mans Classic 2012.
Henri Pescarolo la retrouvera également lors des Classic Days à Magny-Cours en 2015.

 

Matra 670-01 Espace Matra Romorantin 2017

La Matra MS 670-01 exposée en vedette à l’Espace Matra de Romorantin en 2017.

Matra 670-01 Espace Matra Romorantin 2017

Matra MS 670-01 Espace Matra Romorantin 2017

Matra MS 670-01 Espace Matra Romorantin 2017

Matra MS 670-01 Le Mans 1972.

Dernier artefact de la Ms 670-01 encore présent au musée de Romorantin, le capot avant original de 1972, dédicacé par Henri Pescarolo, qui décore le hall d’entrée.

Matra MS 670-01 Jean-Marc Zignani

La maquette de soufflerie au 1/8ème de la MS 670 en version courte 1972 signée Jean-Jacques Zignani présentée au musée de Romorantin.

V12 Matra type MS 12

Le V12 MS12 de la « galerie des merveilles » du musée de Romorantin avec ses échappements 6 en 1, un des plus beaux instruments de musique jamais créés par l’homme.

 

Je ne suis pas cocardier, bien au contraire, mais j’avoue que, pour une fois, si un grand collectionneur français et grand amateur de Matra réussissait à se porter acquéreur de ce monument du sport automobile national et qu’elle retourne au musée, je ne serai pas mécontent.

 

Une fois encore, je tiens à remercier chaleureusement Yves Ronga et Jean-Luc Chétif pour leur confiance et leur grande disponibilité lorsqu’ils me confient leurs photos d’époque et lors des discussions autour du sujet. Je remercie également Christophe Thibault pour m’avoir laissé l’usage d’une des photos de son père, mais aussi les personnes qui m’ont aidé à boucler l’historique de cette auto et qui préfèrent rester discrètes.

 

Crédit photo : Yves Ronga, Jean-Luc Chétif, Christophe Thibault et Vincent Laplaud.

Translate »