Il était une fois …. la Ferrari 333SP au Mans

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Le monde de l’endurance est en émoi depuis l’annonce du retour de Ferrari en prototype et de manière officielle !!

 

La 499P qui va débuter en Mars à Sebring et courir au Mans cette année est annoncée comme l’héritière de la 312 PB de 1973, dernière Ferrari usine vue dans la Sarthe.

En ce moment au musée des 24h

 

Cependant, même si ce ne fut pas un engagement officiel, il ne faut pas oublier la 333 SP qui fit ses débuts en compétition il y a presque 30 ans.

 

Vers 1991/92, les courses de voitures de sport en championnat du monde et aux États-Unis sont à bout de souffle faute de concurrents.

 

L’IMSA créé, pour 1994, le groupe WSC (World Sports Car) composé de prototypes ouverts équipés de moteurs dérivés de la série.

 

La Ferrari 333 SP sera une des premières « vraies » WSC face à des ex Groupe C ou GTP reconverties comme les Spice, Kremer ou Courage …..

 

Maranello s’est lancé sur l’insistance du Gentleman driver Gianpiero Moretti, monsieur « Momo » et du fils du Commandatore Piero Lardi Ferrari.

Ces 2 hommes vont convaincre Luca Di Montezemolo de la pertinence du projet, notamment pour soutenir les ventes aux USA ou les résultats de la marque en Formule 1 intéressent peu.

 

Cette auto, destinée à des concurrents privés, voit sa conception supervisée par Tony Southgate et construite chez Dallara qui s’est aussi occupé de la création de la boîte de vitesse et des suspensions.

 

Le châssis est composé de carbone et d’aluminium nid d’abeille, les suspensions dérivent des Formule 1 de l’époque comme le V12 porté de 3,5 litres à 4 litres et qui va bientôt équipé la F50 de route.

Il délivre 630 chevaux à 11 000 tours/minute.

 

 

Les entrailles de la  » bête « 

 

La boîte 5 est disposée transversalement, les freins sont en acier comme exigé par l’IMSA et l’auto pèse 860 kilos.

 

40 Ferrari 333 SP vont être fabriquées, les 14 premières chez Dallara puis les 26 suivantes chez Michelotto.

 

 

La 333 SP au Mans

 

1995

 

Il faut attendre 1995 pour découvrir la belle Italienne dans la Sarthe.

Deux modèles sont engagés mais un seul fera le déplacement.

 

Engagée par le team Euromotorsport qui court avec en IMSA depuis 1994, la 333 SP jaune Modena reçoit un V12 au régime limité à 10500 tours/minute pour une meilleure fiabilité. Celui-çi est aussi adapté à l’indice d’octane du carburant fourni par l’ACO.

 

Le team dirigé par Antonio Ferrari engage un modèle 1994 reconditionné en version 1995 après la destruction de l’un de ses deux châssis à Road Atlanta début Avril.

 

Ce modèle est modifié par l’écurie côté carrosserie : un capot arrière avec nervure centrale et dérives d’aileron plus basses est disponible en plus du capot traditionnel.

 

Hélas ces efforts spécifiques ne seront pas du tout récompensés.

Tout commence déjà mal le premier jour des essais avec un système de contrôle du régime moteur invalidé par l’ACO.

Privée de chronos officiels, la 333 SP jaune était finalement acceptée le jeudi mais bien tardivement.

 

Résultat : un modeste 4’00″07, le 17ème temps pour Jay Cochran obligé de laisser rapidement le volant à Massimo Sigala et René Arnoux pour qu’ils puissent se qualifier .

 

Les Tifosi espèrent alors un festival en course mais ce ne fut qu’un feu de paille.

Massimo Sigala remonta fort , dépassant les Mc Laren F40 et la Courage de Pescarolo avant de s’arrêter à Arnage, moteur cassé dès le 7ème tour !!!

 

Une trop brève apparition

 

 

1996

 

En 1996 on retrouve deux 333 SP engagées par le Scandia motorsport.

En fait, la voiture du propriétaire du team, Andy Evans, l’est sous le nom de Rocket sport alors que la seconde auto porte le nom et les couleurs du racing for Belgium.

 

 

 

Il s’agit pour le Royal automobile de Belgique de fêter ses 100 ans grâce à une souscription nationale.

Éric Van De Poele, qui pilote régulièrement la Ferrari en IMSA, est associé à ses compatriotes Marc Goosens et Eric Bachelart.

 

 

 

Les deux autos bénéficient des dernières évolutions : une carrosserie remaniée, des prises d’air latérales agrandies, un aileron arrière plus fin et une lame avant dorénavant intégrée au capot.

 

Les deux Ferrari sont présentes aux essais préqualificatifs d’avril et signent les deux meilleurs temps en 3’47″795 pour « la Belge » et 3’48″608 pour « l’ Américaine », une jolie performance.

 

Aux essais officiels la voiture des Belges progressait encore en 3’46″838, le 3ème meilleur temps derrière une TWR/Joëst- Porsche et la Courage C36 de Policand.

Plus en retrait, Evans-Muller-Velez finissaient l’exercice en 3’50″849.

 

En course la numéro 18 ne dépassait pas le cap de la 1ère heure suite à une panne d’essence après avoir perdu 4 tours sur une sortie à Mulsanne de Evans.

 

Pour la numéro 17 la course se passait mieux, du moins jusqu’à 5 heures du matin…

Dans le top 10 dès la 2ème heure, la Ferrari rouge et jaune pointe 6ème à mi course à 5 tours de la TWR de tête.

Elle est 5ème lorsque la boîte donne des signes de faiblesse et doit être remplacée.

Répartie 10ème après 30 minutes d’arrêt, Van De Poele s’adjuge le meilleur temps en course en 3’46″958.

Hélas à 6h55, Éric Bachelart qui vient de prendre son relais sort de la route à la Dunlop, froissant sérieusement la 333 SP……c’est l’abandon.

 

Notons toutefois que les progrès par rapport à 1995 auront été importants, tant en performance qu’en fiabilité.

Faut-il s’attendre à mieux en 1997 ?

 

1997

 

La réponse est oui !!

Deux autos sont à nouveau présentes mais exit le Scandia motorsport et bienvenu au Moretti racing et à Michel Ferté!

 

Pour Gianpiero Moretti, c’est un retour au Mans après 6 ans d’absence et un engagement non validé l’année précédente.

 

Pour Michel Ferté, c’est une montée en puissance après deux années en F40 LM.

 

La 333 SP de l’italien est modifiée par ses soins : aileron arrière très fin et très abaissé, capot moteur abaissé, passages de roues revus, rétroviseurs carénés prises d’air supplémentaires, lame avant intégrée au châssis, frein carbone et échangeur remplaçant le radiateur d’huile.

 

Une 333 SP très modifiée pour Moretti

 

A côté, la « pilot » bleue est un modèle 1994 non modifié le premier châssis à l’avoir emporté en Imsa en 1994 à Road Atlanta.

 

 

Jolie livrée pour la 333 SP originelle

 

Aux préqualifications, la « Momo » en un peu plus de 3’46 devance de 7 secondes la Ferrari Française.

 

Lors des qualifications, l’écart tombe à 4,5 secondes, la 333 SP rouge terminant 2ème meilleur prototype mais derrière les Porsche 911 GT1, McLaren F1 ou Nissan R390 de pointe ….

 

La course de la « vieille » Ferrari ne dure même pas 2 heures.

Pointé 20ème à la 1ère heure, Michel Ferté abandonne sur panne d’essence dans les Hunaudières.

 

 

Course très brève pour Michel Ferté

 

Pour Theys-Moretti-Papis, les débuts sont encourageants avec une 4ème place avant ravitaillement, hélas plus tôt que la concurrence.

7ème en fin de 1ère heure,  la Ferrari est ensuite débordée par tout un groupe de GT1 et la Courage « Vaillante ».

Un changement de disques lui fait perdre 11 minutes à 22h40.

 

Elle pointe 10ème en 12ème heure mais à 14 tours de la Porsche 911 GT1 de tête.

 

Batterie, alternateur par 3 fois et un autre changement des disques augmenteront le retard de la « Momo » mais avec le jeu des abandons, la 333 SP termine 6ème et 3ème prototype.

 

 

Enfin une arrivée !

 

Ainsi la Ferrari rejoint enfin l’arrivée et à une position honorable.

 

 

 

1998

 

En 1998 on retrouve quatre 333 SP engagées par quatre team différents !!

 

Le Moretti racing est de retour avec un nouveau châssis – le numéro 19 – victorieux quelques mois plus tôt aux 24 Heures de Daytona et aux 12 Heures de Sebring !!!

Monsieur « Momo » rêve de la part de trois mais la concurrence est de plus en plus rude avec de nouvelles Toyota, Mercedes ou BMW venues se mesurer à des TWR/Joëst modernisées et rebadgées Porsche sans parler des nouvelles 911 GT1 et autres Nissan R390.

 

 

Dotée de flancs plus plats, d’un capot avant à 2 phares et d’un capot arrière équipée d’une dérive latérale, la 333 SP est aussi passée à la boîte 6 vitesses.

 

Nouveau venu dans le clan Ferrari, le JB /Jabouille- Bouresche dispose d’un châssis neuf (le 22) équipé d’un capot arrière long inédit.

 

L’auto engagée par le Doyle-Risi racing est elle aussi récente (châssis 18) et elle croise le fer aux USA avec celle de Moretti et les Riley & Scott.

 

Pour terminer, on retrouve la 333 SP de Michel Ferté (châssis 05) inchangée donc privée de la boîte 6vet des freins en carbone.

 

 

La meilleure Ferrari aux essais sera la voiture du JB en 3’44″458 ce qui la place seulement au 17ème rang.

Les Ferrari Américaines sont 21ème (Momo) et 22ème (Risi) loin devant la Française bleue (28ème).

 

En course les 4 représentantes de Maranello connaîtront des fortunes diverses.

 

La plus véloce sera la JB de Bouillon-Sospiri-Policand mais hélas elle sera trahie par sa boîte de vitesse à 3h du matin.

Régulièrement dans les 10 premières avant d’être retardée par des problèmes de porte moyeu, la Ferrari blanche et rouge remonte au 7ème rang et 2ème prototype à mi-course.

 

La JB en mode arrière court

 

Elle laisse donc la vedette à la « Momo » suivie de près par la Doyle-Risi.

Peu en verve en début de course,  les 2 barquettes remontent au classement général au gré des retraits et ennuis de la concurrence.

Un changement de boîte de vitesse sur la voiture de Moretti-Theys- Baldi va définitivement placer Velez- Van De Poele-Taylor en tête des 333 SP.

 

Grâce à l’hécatombe en LMP1, la voiture du Doyle-Risi racing finit 8ème au général et leader de cette catégorie.

 

Une victoire mais de catégorie

 

La Ferrari de Moretti ne termine que 14ème.

 

Quand à la Ferrari bleue, l’objectif de Michel Ferté était de durer et d’être régulier mais malheureusement, après des problèmes de pression d’essence et la perte d’une roue à Indianapolis, c’est la boîte de vitesse qui lâche à 5h20 du matin.

Jusque là, la « Pilot » n’avait pu faire mieux que 15ème à la 14ème heure.

 

Nouvel abandon pour le model originel

 

 

1999

 

Il s’agit de la dernière année de présence de la 333SP au Mans.

 

Il faut dire que l’auto est vieillissante et que le plateau cette année là est royal et ultra- compétitif.

 

BMW et Mercedes ont créé de nouvelles autos, Nissan et Panoz passent en LMP, Toyota a optimisé sa GT1, Audi arrive en LMP et GTP, Courage est de plus en plus performant….

 

Dans ce contexte relevé, une seule Ferrari de Jabouille/Bouresche est engagée. Ce team devait engagé un autre modèle mais on ne le verra qu’aux préqualifications et la voiture de Michel Ferté ne sera pas retenue.

 

Aux essais, la Ferrari toute neuve (châssis 30) dotée d’un capot arrière long et d’un V12 « 99 » termine 14ème en 3’38″468 soit un gain de près de 6 secondes sur sa sœur de 1998!

 

Pour la course, on espère chez JB que les habituels problèmes de boîte de vitesse seront de l’histoire ancienne, une nouvelle boîte « endurance » ayant été mise au point.

Hélas cette boîte va lâcher en fin de première heure !!

 

 

En début de course

 

Répartie dernière après une heure de mécanique, la Ferrari verte, blanche et rouge abandonne peu après 22 heures sur panne moteur.

 

Ainsi s’achève tristement l’épopée de la Ferrari 333SP aux 24 Heures du Mans.

 

 

Au final, on retiendra une auto à la sonorité moteur fabuleuse, aux décorations souvent inspirées, une victoire de catégorie et une 6ème place comme meilleur résultat.

 

C’est certainement en deçà des espoirs placés en elle mais sa consommation trop importante, sa fiabilité un peu juste – surtout côté boîte – et un intérêt limité de l’usine Ferrari n’auront pas permis mieux, surtout avec une concurrence de plus en plus aiguisée au fil des ans… Dommage !

 

 

La Ferrari 333SP…..ailleurs .

 

En fait, le palmarès de la barquette Italienne est bien meilleur en IMSA, série pour laquelle elle fut conçue.

 

La  333SP remporte sa toute première course et signe même un doublé à Road Atlanta en 1994.

 

En 1995, Ferrari et Firmin Velez deviennent champions IMSA.

 

En 1997, la 333SP l’emporte enfin aux 12 Heures de Sebring.

Moretti signe un doublé 24 heures de Daytona / 12 heures de Sebring en 1998 alors que Doyle-Risi remporte un petit Le Mans prestigieux face aux Porsche LMP et GT1 d’usine en fin d’année.

Ferrari est de nouveau champion IMSA cette année là.

 

C’est encore mieux du côté de l’ISRS ou FIA sports car la 333SP permet à ses pilotes du JB / JMB puis de la BMS- Scuderia Italia de truster les titres de 1998 à 2001.

 

Au total, sur 144 courses, les statistiques donnent 69 pole positions et 56 victoires, un joli score au final!

 

Crédit photos : Nino Barlini et Stephane Cavoit.

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